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El Morjène
30 octobre 2007

Juin 1949

Ah si je pouvais retrouver ma femme d'avant guerre, joyeuse et épanouie !
Cette guerre a déstabilisé beaucoup de monde en particulier mon frère Joseph qui est revenu des combats meurtri et dégoûté au point qu'un jour il a brûlé des billets de banque. Pour notre famille c'était grave et j'ai dû le faire hospitaliser, je regrette maintenant; après tout il était bien libre de brûler ses billets, il ne faisait de mal à personne mais il avait attendu la visite de notre frère pour le faire !
Antonia est aigrie par tous ces bouleversements, toutes ces peurs, toutes ces restrictions passées, cette maladie de son fils; nos projets de réparations de la salle de séjour-cuisine vont lui redonner du tonus !
Mon fils a mal vécu la pension et l'éloignement de sa mère, il a mal vécu les bombardements; il ne veut pas travailler et aurait dit à sa mère :" On peut vivre sans travailler " à part les sdf je ne vois pas où ça peut le mener, moi je vois bien qu'il ne pourra jamais faire notre métier de paysan car cela demande courage, persévérance et une bonne organisation qu'il n'a pas.
Il aurait pu faire mécanicien mais il a mal été orienté avec " cette maison familiale " qui ne lui a appris pas grand chose de nouveau, à part engrais chimiques et désherbants ce qui posent des problèmes.
J'ai grondé Claire, j'ai élevé la voix car elle répond mal à sa mère; elle n'a pas eu peur de moi et m'a tenu tête ! et pourtant elle sait que je suis violent quand je m'énerve et cela est arrivé plusieurs fois avec son frère j'ai pris la trique et je le regrette car il ne faisait pas exprès d'être méchant et désobéissant, je vois bien maintenant qu'il ne nous ressemble pas et qu'il faudrait essayer de le comprendre !
Point de tendresse dans notre famille, point d'embrassade, point de baiser, une éducation dure . Au fond de moi, je préférerais montrer l'amour que j'ai pour ma femme et mes enfants mais je suis bloqué et je n'arrive pas à me défaire des habitudes spartiates de mon père.
Claire a percé ma faiblesse, ma grande affectivité trop retenue, elle n'a pas du tout peur de moi peut-être sait elle que je la préfère en secret car la plus petite a plus besoin de son père !

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