Rosine pêchait des sourires mais ne pêchait pas

Rosine pêchait des sourires mais ne pêchait pas des poissons. Elle connaissait d'autres femmes qui jouaient le jeu de la pêche et qui n'étaient jamais satisfaites :
celui là était trop bronzé, l'autre avait une femme et des enfants, l'autre trop religieux ou le suivant trop timide.
Quand elles tombaient sur un trop entreprenant, quelquefois elles le rejetaient à l'eau ; l'une d'elle se retrouvait seule et que disait-elle :" Cherche moi un homme " C'était trop, elle l'avait laissée tomber car elle se sentait dans l'impossibilité de lui aider.
Avait-elle tant perdu à ne pas fréquenter les boîtes où l'on allait à la pêche. Cette fréquentation aurait-elle restauré en elle la vitalité ou bien son couple n'aurait pas résisté. Son désir de vivre était ce qu'elle devait garder absolument.
C'était le retour vers l'enfance qui avait restauré en elle le goût de la vie, ce goût qu'elle avait perdu dans le passé car elle s'était laissée manger par les contrariétés, par la haine reçue et le pessimisme ambiant.
Tout cela l'avait grignoté jour après jour et parfois elle avait eu devant ses yeux sa mort ou la mort des autres.
Ses colères intérieures étaient terribles c'est pour cela qu'elle ne s'autorisait pas à les extérioriser, elle craignait un enchaînement et un retour plus violent. Cette colère rentrée avait miné sa santé.
Elle pouvait se mettre en colère quand elle pensait que le sans gêne, l'irresponsabilité, la manipulation était insupportable mais l'homme n'était plus la cible, il avait changé, était-il devenu vrai dans ses paroles et actions ?
C'était à elle de garder sa liberté de pensée, de parole et d'action avec cette prudence excessive contre tout embrigadement, contre toute récupération, contre toutes les prisons et les poisons.