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El Morjène
9 février 2005

PAGE 33

Comme l'âne Nour suivait son chemin, elle n'écoutait ni cri, ni insulte; têtue comme lui elle continuait d'écrire des poèmes en français, son fils et son mari n'étaient pas intéressés. Quand sa soeur venait, elle s'étonnait du ménage mal fait, des fenêtres sans rideau, des lits sans couvre-lit en satin, des meubles sans bibelot, du vaisselier servant de bibliothèque car chaque année ses filles lui ramenaient de France quelques livres de poètes contemporains.
Elle se disait que cette maison devenait peu conviviale depuis que Malika était partie. Elle n'avait plus de congélateur comme avant, son mari ne sacrifiait plus des animaux, tout juste s'il ramenait un poulet vivant du marché.
Nour ne supportait plus les tripes, les têtes sanguinolentes, le sang, elle en avait assez vu couler: animaux égorgés, humains tués; elle avait vu le film " la bataille d'Alger " ils avaient tous pleuré. L'Algérie était là à quelques kilomètres, les algériens venaient faire leurs marchés à Ghardimaou et les tunisiens allaient rendre visite à leurs familles de l'autre côté de la frontière. Nour et Lakdar avaient tous deux des ancêtres algériens et bizarrement c'étaient que des femmes, les hommes étaient partis les chercher en Algérie.
Au souk, ils rencontraient beaucoup d'algériens et ils sympathisaient avec eux; c'était des ruraux, des éleveurs de bétail, des bûcherons, des quincailliers, des tailleurs, des marchands de vêtements ou d'électroménagers, c'était ces derniers qui avaient amené les premiers moulins à café électriques et les femmes avaient négligé leurs pilons en cuivre.
Mais la suspicion commençait à pointer entre les deux pays, on parlait déjà de résistants ou de terroristes suivant l'idée qu'on s'en faisait; on parlait déjà d'assassinats, de meurtres, d'enlèvements

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