Oublier, oublier, dormir, dormir, dormir !Il y

Oublier, oublier, dormir, dormir, dormir !
Il y avait eu trop de bousculements dans sa vie, trop de chamboulements avec ces événements de Mai 68.
Rosine avait besoin de revenir " chez elle ", elle souffrait de cette condamnation de sa mère et de ses tantes, toutes scandalisées par son divorce, elles n'allaient pas changer aussi facilement, quand on est bien-pensant on le reste et on va manifester pour soutenir De Gaule. Elles se réunissaient chez sa mère, ces femmes obsédées par la religion, la bienséance, les traditions et les coutumes. Rosine les laissait à leurs papotages, elles étaient trop âgées pour influer sur la politique.
Il y avait ses enfants, son fils qui faisait son droit et qui était dérangé par la grève des cours, sa fille éducatrice spécialisée qui participait aux manifestations. Depuis son divorce, ses enfants boudaient et ils avaient cessé de visiter leur mère ; il fallait qu'elle accepte ce grand silence !
Il y avait Thomas qui avait ritualisé sa vie, il partageait sa vie entre promenades, aides à ses voisins et à sa soeur, lectures assidues, radios, télévision, musiques diverses, photos.
Elle souffrait de n'être pour lui " qu'une invitée " dans sa maison, elle aurait aimé aller chez lui selon son bon plaisir mais il était très attaché à ses rituels.
Il lui manquait la tenue extérieure pour qu'on le prenne pour un ermite, pour un sage, pour un poète qui n'écrivait pas. Il attendait une grande nécessité, une grande explosion pour écrire et si elles ne venaient pas et bien tant pis...
Il avait des copains engagés dans la politique et dans cette remise en cause de la vie en société mais lui se méfiait de la violence et de la haine, il ne participait pas aux manifestations.
Il vivait proche de la nature, proche des paysans qu'il connaissait bien, écologiste avant l'heure, il savait pourtant qu'on ne changeait pas la société d'un coup de baguette magique.
Il avait été un chaud partisan de la décolonisation et de l'indépendance de l'Algérie, il était proche des idées du psu mais ce n'était pas un militant farouche.