PAGE 11

Un an de fiançailles, de tractations, de préparation du trousseau, il fallait coudre et si on ne savait pas.. faire coudre les robes, les draps, les torchons, les rideaux, les tentures, les nappes; il fallait acheter ou louer les tapis et il faudrait louer les tenues traditionnelles. Pour l'appartement c'était au fiancé de louer, pour les meubles c'était aux deux familles de s'entendre . Il fallait que tout soit prêt, tout soit organisé, qu'il ne manque ni frigidaire, ni cuisinière à gaz, ni vaisselier; devant tant de frais, les familles prirent peur, il fallait s'endetter et on décida d'attendre encore .Youssef fit ouf et Malika pleura .
Sa colère montait de plus en plus, chose curieuse, tout était de la faute de sa mère, son père avait une auréole et de toute façon il était inattaquable, ce mardi elle se décida à montrer sa face cachée . Elle conduisit sa nièce à l'école et dit à son père :" Peux-tu téléphoner en France à Monsieur ben Aïssa, je sais qu'il veut marier son fils et d'après Haïcha, ils auraient penser à moi..." Cela ne se faisait pas mais Lakdar était expert à tirer le ver du nez de ses compatriotes; malheureusement il n'y avait que le répondeur et le père ne parla pas, cela l'arrangeait. La parole avait été donnée et il se demandait si cette fille imprévisible n'allait pas lui infliger la honte de sa vie, lui était honnête et savait ce que c'était un engagement.
Elle attaqua :" Pourquoi ne recevez vous pas comme avant, pourquoi n'invitez vous pas Youssef et sa famille.." ils répondirent évasivement, ils devenaient vieux et ces gens là étaient des pique-assiette.
Elle commença à s'agiter en tous sens !
" De toute façon il est impossible que tu vives ici avec lui, il traîne, boit et fume; j'attends qu'il amène l'argent pour que tu prennes un logis "
" Il veut que j'habite chez son père avec la belle-mère qui va me prendre pour sa bonne; cela est impossible, je refuse absolument.."
" Papa je peux compter sur lui mais toi pétasse qu'est ce que tu es allée faire à Tunis; tu es allée faire la pute pendant un mois et moi je m'occupais de papa..."
" Je n'ai jamais fait cela, tu le sais " répondit Nour
" C'est vrai, j'ai entendu dire qu'elle aime un homme marié de Tunis et moi j'en suis sûre j'ai vu des lettres..."
" Ce n'était pas des lettres , c'était une nouvelle ..."
" Tu es une pute, j'aurai honte à ta place, tu fais la sainte nitouche et tu trompes papa "
Le père ne disait rien, il ne croyait pas aux attaques de sa fille, la mère il l'avait connu à trente ans, elle était vraie; puis elle avait travaillé à laver le linge sale des familles et personne n'avait fait aucun reproche.
" Et moi je te dis va te faire foutre ..."